Libellé de la marque, pas si simple ! retour sur une étape préalable aussi essentielle que délicate
Publié 17 septembre 2024
Libellé de la marque, pas si simple ! retour sur une étape préalable aussi essentielle que délicate
Pas aussi simple qu’il n’y paraît, l’élaboration du libellé de la marque, autrement dit la liste de produits et services que l’on renseigne dans le dépôt, ne doit pas être prise à la légère !
Pour rappel, le droit de marque n’est pas absolu en ce que le monopole octroyé ne porte que sur les produits et/ou services inscrits dans le libellé. Ainsi, vous l’aurez compris, la conception du libellé revêt une importance capitale et nécessite une attention toute particulière.
Mais alors en quoi un libellé réfléchi est nécessaire ? Quels sont les risques et écueils à éviter ? Et comment s’en prémunir ?
Pas d’inquiétude, nous allons vous éclairer dans cet article !
Choisir les produits et services adaptés à la réalité de votre usage à venir:
Afin que le titre soit exploitable il est nécessaire de choisir, et s’y limiter, des produits et services correspondant à ses besoins.
Cela tombe sous le sens mais la tâche est parfois très compliquée et ardue qu’il n’y paraît pour trouver les termes précis et adéquats représentants le plus parfaitement possibles les produits et services marqués. Tout ne figure pas dans la nomenclature officielle, il faut trouver des proximités entre le produit ou service à protéger et celui qui en serait le plus proche et raisonner par analogie.
Un choix avisé est donc nécessaire à l’obtention d’un monopole adéquat. Nous verrons également que le choix du libellé est fondamental tant au regard de la pérennité du titre que concernant les actions que le titulaire peut engager sur la base de celui-ci.
Eviter le rejet de la marque :
Un libellé énumérant des produits et services trop imprécis peut conduire au rejet de la demande d’enregistrement de la marque (Article R-712-3-1). Effectivement, par souci de sécurité juridique, l’office ne peut pas délivrer un droit de marque dont on ne peut déterminer précisément la portée.
Ont ainsi été refusées à l’enregistrement les marques désignant des “services d’audit” en classe 35 (CA Paris, 4è ch., sect. A, 25 février 2003) et des “bracelets, chaînes, boissons” (CA Paris, 4e ch., sect. B, 4 avril 2008). L’office considère en effet que le terme “service d’audit” est trop large pour qu’on puisse en délimiter le contenu “de façon immédiate, certaine et constante”. Concernant les “bracelets, chaînes, boissons”, l’office estime que “la référence générale à deux classes, sans autre précision, est insuffisante car elle ne permet pas de délimiter immédiatement la portée de l’enregistrement”.
Bien sûr, il arrive que l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) permette au déposant de régulariser sa demande d’enregistrement. Toutefois, mieux vaut ne pas attendre cette possibilité de régularisation dans la mesure où, en plus de retarder le processus d’enregistrement, elle n’est pas systématique et est soumise à un délai impératif !
Éviter la déchéance de la marque :
Par ailleurs, le demandeur néophyte pourrait être tenté de lister un nombre assez important de produits et services pour s’assurer, selon lui, d’un monopole plus large.
Il s’agit d’une erreur de taille. Si la marque couvre plus que les produits et services effectivement exploités, celle-ci pourra être, au moins partiellement, déchue si elle n’a pas été exploitée au bout d’un certain temps (art. 714-5 CPI + voir notre précédent article sur l’exploitation quinquennale https://www.degez-kerjean.fr/archives/la-dech-ca-existe-aussi-pour-les-marques/).
Effectivement, le titulaire d’une marque est tenu à une obligation d’exploitation de son titre. Il s’agit de la contrepartie à un monopole pouvant en théorie être perpétuel sous réserve de renouvellement.
L’importance au regard d’une potentielle action en contrefaçon ou en opposition :
L’intérêt d’être titulaire d’un monopole est de pouvoir s’en prévaloir et, une fois encore, l’effectivité du droit de marque dépend du choix et de la précision du libellé.
Imaginons un titulaire engageant une action en contrefaçon contre un concurrent qui commercialise sous une marque similaire à la sienne des fils de coton.
Si la marque du titulaire couvre seulement des vêtements techniques en coton et non pas des fils de coton, il y a fort à parier que l’action n’aboutira pas, faute de similarité suffisante. Pire, si la marque du titulaire couvre des fils de coton, mais que l’entreprise n’a pas exploité ce produit depuis au moins 5 ans avant l’assignation https://www.degez-kerjean.fr/archives/marque-similaire-dun-concurrent-toleree-plus-de-5-ans-plus-daction/, alors la sanction sera double et le titulaire perdra probablement à la fois l’action (art L.716-4-3) et, après le procès, sa marque qui sera déchue.
Par ailleurs, tout comme l’action en contrefaçon, l’opposition exige un risque de confusion entre les marques. Si les produits et services de la marque opposante ne concordent pas avec ceux qu’elle exploite réellement, l’action sera rejetée. Il s’agit donc de déterminer son libellé avec soin en considération de ses besoins et perspectives réelles d’exploitation pour pouvoir s’opposer efficacement à ce qui empiète sur notre monopole. Dès lors, un mauvais choix de produits et services ou une imprécision du libellé, sachant que cette imprécision doit être interprétée en défaveur du titulaire (CJUE, 4 mars 2020, Tulliallan Burlington Ltd c/ EUIPO), pourrait faire perdre de son effectivité au droit de marque du titulaire.
Afin de vous éviter tout désagrément et répondre au mieux à vos besoins réels, le cabinet DEGEZ-KERJEAN Avocats se tient à votre disposition pour vos élaborations de libellés et dépôts de marques.