La procédure SYRELI ou comment récupérer son nom de domaine en .fr
Publié 08 avril 2016
Au mois de novembre 2011, l’Agence Française pour le Nommage Internet en Coopération (AFNIC) a mis en place un système de résolution des litiges concernant les noms de domaine en « .fr » : SYRELI (Système de Résolution des Litiges)[1].
Particularités de la procédure SYRELI
Cette procédure concerne uniquement les noms de domaine créés ou renouvelés postérieurement au 1er juillet 2011.
Conformément aux dispositions de l‘article L.45-6 du Code des postes et des communications électroniques, la personne souhaitant déposer une demande devant le Collège SYRELI de l’AFNIC doit démontrer un intérêt à agir mais également demander à Office la suppression ou le transfert à son profit d’un nom de domaine[2].
L’Office saisi doit alors statuer dans un délai de deux mois à partir de la réception de la demande du requérant. La décision de l’Office est susceptible de recours devant le juge judiciaire[3].
La décision du Collège SYRELI est exécutée 15 jours calendaires à partir de la notification aux parties de la décision. Si dans un délai de 60 jours la décision du Collège SYRELI n’est toujours pas exécutée, l’AFNIC a la possibilité de supprimer le nom de domaine, objet du litige[4].
Caractères du nom de domaine contesté
La saisine du collège suppose que le nom de domaine soit :
« 1° Susceptible de porter atteinte à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ou à des droits garantis par la Constitution ou par la loi ;
2° Susceptible de porter atteinte à des droits de propriété intellectuelle ou de la personnalité, sauf si le demandeur justifie d’un intérêt légitime et agit de bonne foi ;
3° Identique ou apparenté à celui de la République française, d’une collectivité territoriale ou d’un groupement de collectivités territoriales ou d’une institution ou service public national ou local, sauf si le demandeur justifie d’un intérêt légitime et agit de bonne foi »[5].
La preuve de l’absence d’intérêt légitime ou de la mauvaise foi du titulaire du nom de domaine
Si le Collège SYRELI de l’AFNIC considère que le nom de domaine est bien susceptible de porter atteinte à des droits de propriété intellectuelle par exemple, il va alors analyser l’argumentaire du requérant afin de savoir si le titulaire actuel du nom de domaine bénéficie d’un intérêt légitime et agit de bonne foi.
L’article R.20-44-46 du Code des postes et des communications électroniques prévoit plusieurs comportements pouvant notamment caractériser la mauvaise foi :
- « avoir obtenu ou demandé l’enregistrement de ce nom principalement en vue de le vendre, de le louer ou de le transférer de quelque manière que ce soit à un organisme public, à une collectivité locale ou au titulaire d’un nom identique ou apparenté sur lequel un droit est reconnu et non pour l’exploiter effectivement ;
- avoir obtenu ou demandé l’enregistrement d’un nom de domaine principalement dans le but de nuire à la réputation du titulaire d’un intérêt légitime ou d’un droit reconnu sur ce nom ou sur un nom apparenté, ou à celle d’un produit ou service assimilé à ce nom dans l’esprit du consommateur ;
- avoir obtenu ou demandé l’enregistrement d’un nom de domaine principalement dans le but de profiter de la renommée du titulaire d’un intérêt légitime ou d’un droit reconnu sur ce nom ou sur un nom apparenté, ou de celle d’un produit ou service assimilé à ce nom, en créant une confusion dans l’esprit du consommateur[6]».
Récupération de nom de domaine et contrat de distribution
Dans une décision du 16 février 2016, un agent commercial, distributeur des produits « Antonio Lupi » en France, a enregistré le nom de domaine « antoniolupi.fr », pendant l’exécution de son contrat de distribution, sans l’autorisation du titulaire de la marque communautaire Antonio Lupi[7].
A la suite de la cessation de leurs relations d’affaires, l’ancien agent commercial a conservé et renouvelé la réservation du nom de domaine. Le site était exploité par l’ancien agent commercial pour vendre des produits « Antonio Lupi » qu’il avait toujours en sa possession.
Le Collège SYRELI a considéré que l’ancien agent commercial et titulaire du nom de domaine litigieux avait profité de la renommée du requérant en renouvelant le nom de domaine et a créé un risque de confusion dans l’esprit du consommateur. Le requérant ayant réussi à prouver l’absence d’intérêt légitime de l’ancien agent commercial à conserver le nom de domaine « antioniolupi.fr » et la mauvaise foi de ce dernier[8].
Impossibilité de demander une indemnisation
Aucune demande d’indemnisation du préjudice subi ne peut être accueillie par le Collège SYRELI de l’AFNIC.
Si le requérant souhaite obtenir une indemnisation au titre de l’atteinte subie, il doit alors opter pour un recours judiciaire ou extra-judiciaire.
Il doit être précisé qu’une demande de suppression ou de transfert de nom de domaine au Collège SYRELI de l’AFNIC n’est pas recevable s’il existe une procédure judiciaire ou extra-judiciaire en cours portant sur le nom de domaine litigieux[9].
Le requérant doit supporter les frais de procédure qui s’élèvent à 250 € HT (300 € TTC).
Attention aux demandes irrecevables !
Dans une décision du 16 février 2016, le Collège SYRELI a rejeté une demande de récupération du nom de domaine « adopteunecougar.fr » au titre de l’absence de qualité d’un conseiller en gestion d’affaires pour représenter son client[10].
Selon une étude de l’AFNIC, 50 % des demandes irrecevables le sont au titre de l’absence de pouvoir du représentant d’agir pour le requérant[11].
L’avocat n’ayant pas besoin d’un pouvoir spécial pour représenter son client, il est subséquemment plus prudent de contacter votre avocat afin d’effectuer la procédure SYRELI.
Pour plus d’informations, vous pouvez nous contacter à l’adresse suivante :
avocats@degez-kerjean.fr
Olivia BELOUIN, Sylvie DEGEZ
[1] AFNIC, « L’AFNIC lance SYRELI : le nouveau système de résolution des litiges », consulté le 23.03.2016, URL : http://www.afnic.fr/fr/l-afnic-en-bref/actualites/actualites-generales/5260/show/l-afnic-lance-syreli-le-nouveau-systeme-de-resolution-de-litiges-2.html
[2] Article L.45-6 du Code des Postes et des Communications Electroniques, consulté le 23.03.2016, https://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=DDF97ED47BDC727CFFEF038DBCDAF149.tpdila10v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006150688&cidTexte=LEGITEXT000006070987&dateTexte=20160323
[3] Article L.45-6 du Code des Postes et des Communications Electroniques, précité
[4] Règlement du système de résolution des litiges, SYRELI, AFNIC, 2011, consulté le 24.03.2016, https://www.afnic.fr/medias/documents/Reglement_du_systeme_de_resolution_de_litiges_VF.pdf
[5] Article L.45-2 du Code des Postes et des Communications Electroniques, consulté le 23.03.2016, https://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=DDF97ED47BDC727CFFEF038DBCDAF149.tpdila10v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006150688&cidTexte=LEGITEXT000006070987&dateTexte=20160323
[6] Article R.20-44-46 du Code des Postes et des Communications Electroniques, cet article prévoit également les cas pouvant constituer un intérêt légitime du titulaire du nom de domaine, consulté le 24.03.2016, https://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=C86D74C42F02D20E729B522B53E197A7.tpdila14v_2?idSectionTA=LEGISCTA000024436377&cidTexte=LEGITEXT000006070987&dateTexte=20160324
[7] Décision de l’AFNIC du 16 février 2016 « antoniolupi.fr » (demande n°FR-2016-01072), consultée le 24.03.2016, https://www.syreli.fr/decisions
[8] Décision de l’AFNIC du 16 février 2016 « antoniolupi.fr » (demande n°FR-2016-01072), précitée
[9] SCOPE SUR SYRELI, novembre décembre 2015, consulté le 24.03.2016, https://www.afnic.fr/medias/images/scope/SCOPE_2015/Scope_nov_dec_2015.jpg
[10] Décision de l’AFNIC du 16 février 2016 « adopteunecougar.fr » (demande n° FR-2016-01069), consultée le 24.03.2016, https://www.syreli.fr/decisions
[11] SCOPE SUR SYRELI, novembre décembre 2015, consulté le 24.03.2016, https://www.afnic.fr/medias/images/scope/SCOPE_2015/Scope_nov_dec_2015.jpg